Prière

Si cette nuit doit être la dernière que je passe avec moi, faites Votre possible pour ne pas nous séparer.

Que Votre mémoire, au moins, nous garde réunis, bien que nous ne soyons pas plus mémorables que les autres.

Et si Vous n’avez pas de mémoire à proprement parler, faites que nous soyons quelque part ensemble, si tant est qu’il soit encore décent de parler d’espace sans rougir.

C’est le sentiment d’éternité que j’ai partagé avec moi pendant toute ma vie qui me fait oser cette prière.

Nous ne savons pas d’où vient ce sentiment liquide, s’il est menteur ou non. Peut-être l’avons-nous attrapé machinalement, comme la manie de se réveiller le matin. Peut-être l’avons-nous inventé, croyant le découvrir.

A défaut de mémoire et d’espace, pouvons nous compter sur Votre oubli ? Il suffirait de nous laisser tels qu’en nous-mêmes, au cœur même de notre habitude. Il suffirait de suivre la pente pour continuer, sans pieds, sans mains, sans sommeil, sans rien. Mais continuer, tout de même. Vu d’ici cela nous paraît possible et digne d’être essayé, tant notre vertu d’exister est grande – et sans faille.

PIerrE DumAYET, NARcissE

 

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